Demandons à un Allemand de décrire le Schleswig-Holstein. Que dira-t-il ?
A moins d’y vivre ou d’y être venu en vacances, souvent, il ne saura pas le situer avec exactitude. Par contre, il saura dire que c’est le grand Nord. S’il est un peu mesquin, il dira peut-être aussi que c’est comme chez les Chtis, qu’il y pleut tout le temps ce qui n’est pas vrai du tout. La preuve : l’île de Fehmarn qui se trouve du côté de la Baltique est un des endroits les plus ensoleillés d’Allemagne.
Il pourra certainement dire aussi que dans le Schleswig-Holstein, on ne manque pas de côtes. On peut prendre son petit-déjeuner en regardant le soleil se lever sur la Mer Baltique et passer son après-midi à la plage de la Mer du Nord. Et ça, c’est vrai. Dans le Schleswig-Holstein, on n’est jamais très loin de la mer.
Du coup, il n’est pas surprenant qu’on ait essayé de créer une liaison entre ces deux mers. Comme l’Eider traverse presque tout le pays avant de se jeter dans la mer du Nord à Tönning, il était logique qu’elle soit mise à contribution pour la création d’une voie d’eau. Depuis 1895, les célèbres vaches Holstein observent le va-et-vient régulier des bateaux sur le canal de Kiel. Ces 100 kilomètres sont l’aboutissement d’un long rêve mais sachez que bien avant la création de ce grand canal qui relie la mer du Nord à la mer Baltique, on profita de l’Eider. Aussi, regardons de plus près ce cours d’eau de 188 kilomètres (le plus long du Schleswig-Holstein).
Dans cet article, je vous fais découvrir la partie orientale de l’Eider — celle qu’on appelle « die Obere Eider » (L’Eider Supérieure) qui se trouve avant le canal.
Schmalstede
Entre sa source au sud de Kiel et le lac de Westensee, l’Eider est encore étroite. Elle serpente dans une large vallée humide, créant un habitat précieux pour les animaux.
Westensee et Achterwehr
À la hauteur du manoir de Marutendorf et du village de Hohenhude, elle se jette dans le grand lac de Westensee et en ressort au niveau de Felde avant de disparaître à nouveau, dans le canal de Kiel cette fois-ci.
Cette région riche en lacs fait partie du parc naturel de Westensee. A Achterwehr et Flemhude, la rivière a gagné en volume ce qui permet d’y faire du canoë ou du paddle. Entre le lac et le barrage qui mène au canal, le cours de l’Eider est idyllique.
Flemhude
Au nord du lac de Westensee, on trouve un autre lac dont l’histoire est mouvementée. Il s’agit du lac de Flemhude.
Pendant longtemps, L’Eider représenta une voie de transit importante. Les bateaux de commerce remontaient le cours d’eau jusqu’au lac de Flemhude avec leurs marchandises. De là, celles-ci étaient acheminées vers la côte de la Baltique sur des charrettes et carrioles en tous genres.
Plus tard, lorsque le commerce se développa et surtout les techniques de construction, un roi, Christian VII du Danemark, approuva la construction d’un canal reliant la mer du Nord à la mer Baltique. Pour créer cette voie directe, on décida d’utiliser le cours de l’Eider sur 130 km et celui de la Levensau, un ruisseau qui prend sa source pas très loin du lac de Flemhude (dans les marécages de Warleberg pour être précis). Ce ruisseau avait l’avantage de se jeter — autrefois — dans le fjord de Kiel au sud de Holtenau.
Dans les chroniques, ce premier canal porta d’abord le nom de canal du Schleswig-Holstein car les deux rivières formaient depuis longtemps une frontière naturelle entre le Schleswig et le Holstein. Après la guerre du Schleswig-Holstein (1848-1851), la couronne danoise préféra l’appeler le canal de l’Eider. On voulait éviter coûte que coûte tout ressentiment nationaliste. En 1866, lorsque la Prusse s’empara de la région et créa la province du Schleswig-Holstein, elle reprit l’ancien terme.
Quel que soit son nom, ce premier canal fut construit entre 1777 et 1784. A l’époque, il en fallut de la main d’œuvre pour creuser ces 34 km. Jusqu’à 3000 personnes ! A la fin des travaux, il faisait 28 mètres de largeur sur 3,45 m de profondeur et reliait la ville de Rendsburg à Kiel.
En tout, on bâtit six écluses avec 7 mètres de dénivelé. Pour faciliter la navigation, le lit de l’Eider avait été élargi et approfondi entre Friedrichstadt et Rendsburg. Donc, à partir de 1784, plus besoin de s’arrêter au lac de Flemhude. On continuait en bateau en passant dans la vallée de la Levensau et on sortait au niveau de Holtenau.
Le canal de Kiel
Très rapidement, on se rendit compte que ce premier canal qui fut utilisé une centaine d’années avant d’être transformé, avait des inconvénients. Le trajet d’une mer à l’autre durait trois jours et par temps défavorable, il fallait se faire tracter. Pas moyen d’utiliser la voile. Qui plus est, le passage était trop lent, trop cher et ça bouchonnait sec. Pour finir, du côté de la mer du Nord, la vasière située dans l’embouchure de l’Eider représentait un des plus gros problèmes pour les navires.
Comme les bateaux devenaient de plus en plus gros, il fallut trouver une solution assez rapidement et c’est alors qu’on décida de construire l’actuel canal de Kiel. Un projet de grande envergure !
C’est près du bac de Landwehr que l’Eider se fond au canal. Son eau est alors canalisée jusqu’à la ville de Rendsburg.
Les anciennes écluses
Aujourd’hui, le canal de l’Eider que prit Jules Verne en été 1881 avec le Saint-Michel III n’existe plus. Il a été utilisé en parties pour créer le nouveau canal du Schleswig-Holstein. Et c’est pour cette raison que l’on retrouve plusieurs écluses restaurées près de la voie navale actuelle. Ici aussi, il y a de belles promenades en perspective…
Balade au nord des écluses de Kiel