Pendant longtemps, la région de la Schlei est restée ce qu’on appelle un « Geheimtipp » — un bon plan bien secret — mais depuis 2020, les touristes sont de plus en plus nombreux à y venir. Ce qu’ils apprécient ? Le charme du paysage, la proximité de la mer Baltique et la zénitude de la région.
Sur la liste des sites à visiter au bord de ce long bras de mer, il y a le petit village de Sieseby qui se compose d’une seule rue et qui descend jusqu’à l’eau — petit, mais assez grand pour flâner et s’amouracher de l’esthétique du lieu. Au demeurant, Sieseby se vante d’être un des dix plus jolis villages d’Allemagne et le plus beau de la région.
La région de la Schlei
Malgré son apparence de rivière, la Schlei est un bras de mer de la Baltique. Son paysage de collines et de petites falaises s’étend sur 42 kilomètres entre la frontière danoise et Hambourg.
Au début du Moyen-Âge, les Vikings utilisaient ce cours d’eau pour traverser la péninsule du Jutland en bateau et ils finirent même par s’implanter juste à l’endroit où la Schlei forme un cul-de-sac, à mi-chemin entre Mer du Nord et « Mer de l’Est ». Ainsi, Haithabu servit de métropole et de plaque tournante commerciale pendant plusieurs siècles. Plus tard, les nobles et les grands propriétaires terriens firent construire leurs châtelets et leurs manoirs sur ses rives. Néanmoins, la région resta essentiellement rurale.
Bien avant que la Schlei serve de « région modèle » après le premier confinement, les riches Hambourgeois venaient s’y ressourcer le week-end. Depuis, le touriste lambda l’a remarqué aussi : la région est beaucoup moins peuplée que les plages de la Baltique. Et même quand on ne peut pas se payer le luxe d’une chaumière de caractère au bord de l’eau ou celui d’un voilier amarré dans un des petits ports, ce n’est pas grave, il y a de jolies locations dans le coin.
Autour de la Schlei, on trouve beaucoup de nature et quelques villes charmantes comme Kappeln, Schleswig et Arnis, mais aussi un grand nombre de villages et de hameaux perdus dans les roseaux. J’ai déjà présenté le village de pêcheurs de Maasholm, celui de Missunde et sa falaise ainsi que Borgwedel et son passé de briques. Le village de Sieseby fait partie lui aussi des joyaux vantés dans les guides touristiques quoiqu’il soit vraiment petit.
Le chaume des toits n’y est pas pour rien : c’est rustique et terroir mais ça fait toujours flancher les cœurs…
L’histoire de Sieseby
L’église romane de Sieseby est certainement le bâtiment le plus ancien du village puisqu’elle date du XIIe siècle alors que la plupart des chaumières du village ont été construites dans la première moitié du XIXe siècle. Son aspect compact et cossu est compensé par la blancheur de ses façades et toutes ses constructions annexes.
Son toit orné d’une belle horloge s’élève au-dessus d’une vieille allée de tilleuls (historique, l’allée, et longue en plus). Autour, comme souvent dans la région, on trouve un cimetière et comme cette église est située en plein milieu du village et tout près de l’eau, derrière la verdure de ses arbres et de ses haies, on aperçoit non seulement les toits rustiques des maisons environnantes mais aussi le ruban bleu de la Schlei.
Tout le village est classé historique et protégé par la loi depuis l’an 2000. C’est d’ailleurs comme s’il y avait une « Corporate Identity ». Sous les toits de chaume, les maisons ont toutes des murs blancs comme neige.
Cette uniformité a ses racines dans l’histoire de la création du site. En effet, c’est à partir de 1839 qu’un certain Gustav Anton Schäffer, commerçant de Hambourg, devient propriétaire du manoir de Bienebek et de Sieseby. Il fait alors construire des habitations pour ses employés — des bâtiments qui gardent sa signature puisqu’on y trouve les initiales G.A.S. ancrées entre les briques çà et là.
Aujourd’hui encore, la plupart des maisons appartiennent à la famille ducale de Schleswig-Holstein-Sonderburg-Glücksburg qui acheta l’ensemble en 1887. En général, elles sont gérées en fidéicommis.
Les bords de la Schlei
Le petit parking à l’entrée, juste en bord de route, annonce déjà à quoi ressemblera le village : un ensemble de tilleuls et de toits de chaume. Une couleur récurrente : le blanc. Murs blancs, bancs blancs, portails blancs. A Sieseby, on a l’amour du détail. Même la maisonnette où se trouvent les toilettes publiques (payantes) a été construite dans le style « Sieseby ».
Le long de la rue qui descend vers la Schlei, les chaumières — toutes très coquettes — se suivent, entourées de haies et de jardins ravissants. Ici et là, des confitures faites maison et des petits objets décoratifs ont été mis en vente sur le trottoir. À côté, on trouve toujours une caisse. Comme souvent dans les petits villages, il s’agit d’un self service. On prend, on donne. Une question de confiance et un modèle de vente simple, pratique et surtout sympa car même sans voir de monde, on a l’impression qu’il y a de la vie dans le village — et qu’on est en interaction avec ses habitants.
Les maisons, l’église et le cimetière sont encadrés par deux restaurants, l’un en haut de la rue, primé deux années de suite par Michelin, l’autre en bas, près de l’eau. Sinon, il y a un atelier d’art mais c’est tout. Il faut savoir que Sieseby n’a que cent habitants.
La rue s’arrête au bord de la Schlei. Là, entre les roseaux, un ponton accueille les bateaux de croisière qui naviguent sur l’eau. L’été, certains font escale à Sieseby et déposent leurs passagers. Pour les individuels, il y a aussi quelques places pour accoster.
Sincèrement, j’ai déjà fait des promenades plus jolies et plus variées le long de la Schlei. Cependant, ce serait dommage de se cantonner au village et de repartir tout de suite puisqu’un chemin permet de longer la berge. Qui plus est, le coin est vraiment mignon et par beau temps, la Schlei et sa campagne sont toujours charmantes. Il y a le vert des champs, le susurrement des roseaux et le bleu de l’eau.
La promenade se fait sur une petite route carrossable qui passe devant quelques (superbes) habitations. De temps en temps, surtout au niveau de Gut Bienebek, des petits bouts de plage permettent de s’approcher de l’eau et de s’asseoir sur du sable fin et clair. Mais en général, une bande de roseaux vous sépare de la berge.
En suivant ce chemin sur deux kilomètres, vous pourrez aller jusqu’au manoir de Bienebek, un domaine privé où Marie Alix, duchesse de Schleswig-Holstein, a vécu jusqu’à sa mort en 2021. Le domaine en soi n’est pas accessible mais de la route, vous verrez les deux granges monumentales de 1717 et 1719 ainsi que le bâtiment principal. L’envergure des toits de chaume est impressionnante et le site a du charme. Il est surtout typique des manoirs du nord.
Qui veut aller plus loin, se retrouve à Winnemark et peut même rejoindre la toute petite ville d’Arnis en passant de l’autre côté du fjord. Pour cette promenade, je conseille le vélo. A pied, certaines portions me paraissent un peu longuettes.
En ce qui concerne la faune, Sieseby a un atout : ses aigles de mer qu’on peut voir près de la Schlei même en pleine journée…
Arnis
Je ne veux pas m’étendre sur l’histoire d’Arnis. Dans cet article qui présente une promenade entre Kappeln et Arnis, vous trouverez plus d’informations sur la création de cette ville qui est du reste la plus petite ville d’Allemagne.
Je me contenterai cette fois-ci de quelques photos hivernales prises juste après Noël.
Autres balades sur la Schlei
Côté sud (Schwansen)
Côté Nord (Angeln)